Collection: Yankel Jacques

Biographie

Jacques Yankel, pseudonyme de Jakob Kikoïne, né le 14 avril 1920 à Paris, mort le 2 avril 2020 à Aubenas (Ardèche), est un peintre, sculpteur et lithographe français de la seconde École de Paris. Il est le fils du peintre Michel Kikoine (1892-1968).
Alors que, cinq ans après sa sœur Claire, il naît à l'hôpital Boucicaut à Paris du mariage de Michel Kikoïne et Rosa Bunimovitz - acceptant mal cette naissance, Kikoïne avait, en compagnie de Chaïm Soutine, fui à Cagnes-sur-Mer peu avant l'accouchement, abandon d'une durée d'un an que Rosa ne lui pardonnera pas malgré le sens paternel très développé qui suivra, Jacques Yankel passe une jeune enfance précaire dans la cité d'artistes de la Ruche, au 2, passage de Dantzig dans le 15e arrondissement, qui est demeuré le lieu d'habitation de la famille Kikoïne de 1912 à 1926. Il y grandit entouré de sa famille et des œuvres d'art jusqu'à son entrée à la maternelle.
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En 1926, Michel Kikoïne fait l'acquisition d'une maison à Annay-sur-Serein (par quoi Yankel demeurera lié au département de l'Yonne), puis en 1927 la famille quitte La Ruche pour s'installer à Montrouge (rue de Gentilly) - « mes mauvaises fréquentations rue de Gentilly auraient pu faire de moi un vrai malandrin » évoquera Yankel - avant de revenir - « la misère a provoqué notre départ du bel atelier de la rue de Gentilly » se souviendra-t-il encore - dans le quartier Montparnasse (7, rue Brézin) en 1933.
Sa scolarité est déplorable et il sera refusé à l'École des arts appliqués et aux Beaux-Arts de Paris. Pendant la Seconde Guerre mondiale, il occupe des emplois temporaires en imprimerie et atelier de gravure. En 1941, il emménage à Toulouse, en zone libre, et devient assistant géologue. Il épouse Raymonde Jouve la même année, Michel et Rosa Kikoïne franchissant clandestinement et séparément la ligne de démarcation afin d'être présents. Il poursuit ses études et soutient brillamment un diplôme d'études supérieur en géologie à la faculté des sciences de Toulouse. En 1946, naît sa fille Dinah Kikoïne. Il participe épisodiquement en peintre amateur au groupe du Chariot avec les artistes Jean Hugon, Michel Goedgebuer, Bernard Pagès, Christian Schmidt, André-François Vernette et Jean Teulières.
En 1949, il est engagé par le ministère des Colonies pour la carte géologique de Gao-Tombouctou-Tabankort en Afrique-Occidentale française. De cet épisode, il gardera un goût certain pour l'art africain dont il deviendra un collectionneur. L'année suivante, il rencontre inopinément Simone de Beauvoir et Jean-Paul Sartre à Gao. Ce dernier l'encourage à se tourner vers la peinture.
En 1952, il retourne habiter à Paris, se réinstallant à La Ruche, et fait ses débuts de peintre à la galerie Lara Vinci, rue de Seine. En 1954, en parallèle de sa soutenance de thèse en géologie à la Sorbonne, il expose ses œuvres à Paris et Mulhouse. En 1955, il connaît ses premiers succès en tant qu'artiste. Il gagne le prix Neumann qu'il partage avec Réginald Pollack, le 1er prix de la Société des amateurs d'art, ainsi que le prix Fénéon, se resituant lui-même ainsi : « à Paris, l'époque est au misérabilisme et je suis misérabiliste comme mes amis d'alors, Orlando Pelayo, Jean Jansem, François Heaulmé... La nouvelle école de la Ruche est constituée de Paul Rebeyrolle, Simone Dat, Michel Thompson, Michel de Gallard, qui pratiquent un réalisme expressionniste influencé par Constant Permeke, Bernard Lorjou et Francis Gruber, et au fond assez voisin de notre travail de l'époque ».
De 1957 (année qu'il associe à sa première exposition à la galerie Romanet et à l'influence de Nicolas de Staël sur son œuvre) jusqu'à 1959, il continue d'exposer et voyage au Maghreb, aux Baléares, à Genève et en Israël. En 1960, il se marie avec Jacqueline Daneyrole à Labeaume où il élit domicile. De 1961 à 1965, il expose à Paris, en Israël et à Amsterdam. En 1966, sa mère Rose Kikoïne meurt. En 1967, il part précipitamment en Israël pour la guerre des Six Jours. Il débarque le sixième. Il s'engage volontairement au kibboutz Zikhron Yaakov et Maayan Zvi et y travaille trois mois.
Son père Michel Kikoine meurt en 1968, année où il est engagé comme professeur d'art plastique par des étudiants à l'École des beaux-arts de Paris afin de succéder à Raymond Legueult, démissionnaire. Installé au 3, rue de la Cité-Universitaire, il poursuivra jusqu'en 1985 cet enseignement que l'on associe historiquement à l'émergence du mouvement Vohou-vohou, parti d'une vague d'étudiants de l'Êcole des Beaux-Arts d'Abidjan venus poursuivre leurs études dans son atelier, pour être de novembre 1985 à janvier 1986 le commissaire de l'exposition Arts africains - Sculptures d'hier, peintures d'aujourd'hui organisée à l'initiative de l'A.D.E.I.A.O. au Musée des arts africains et océaniens de Paris.
Parallèlement, il continue à exposer durant les années 1970. En 1978, il participe à la réalisation des décors de la pièce Othello de Shakespeare montée par Georges Wilson. Il commence à travailler avec la galerie Yoshii à Tokyo et Paris. En 1987, il se marie avec Lidia Syroka et expose à Anvers. Il effectue cette année-là la première donation de sa collection d'art naïf au Musée des arts naïfs et populaires de Noyers-sur-Serein. La seconde donation aura lieu en 2018.
En 2019, Jean-François Lacour, éditeur de Jacques Yankel, témoigne : « Il va avoir cent ans en avril 2020, et ce qui est étonnant, c'est sa jeunesse : il peint, il dessine et parle de l'art comme un enfant ».
Les années 1970 : Après la mort de son père, Jacques Yankel s'appuie sur la littérature dans le but de la transposer. Il s'inspire notamment de la Thora. Il peint aussi des galets incorporés à des dalles de ciment et exécute des projets destinés à l'architecture. De 1975 à 1980, il peaufine la courbe de son graphisme. Il joue des non-couleurs, tandis que sa peinture ne néglige ni la nature morte, ni les intérieurs aux fortes consonances et aux partages régulateurs.
Les années 1980 : Il affermit dans son atelier ardéchois son goût pour les assemblages d'objets hétéroclites, communs ou non, sur papier ou sur toile. Entre 1985 et 1990, il insiste sur les virtualités du trait et leur étroite complicité avec les masses de couleur incisées de personnages linéaires.
Les années 1990 : Il expérimente sans relâche le champ opératoire qui s'offre à ses sens. Il peint dans l'urgence, à l'huile de préférence. « On vit et on peint sans savoir », énonce-t-il en conclusion de ses confidences dans la monographie de Raymond Laurent. Sa production est faite de reliquaires, d'assemblages et d'ex-voto. Il libère son imagination au travers d'objets prélevés au folklore artisanal, industriel ou urbain.